Le bio dans les cantines :
Questions à Jacques Boutault, élu EELV, maire du 2e arrondissement de Paris à propos du bio dans les cantines, introduit en 2002.
Pourquoi est-ce aussi important d’introduire le bio dans les cantines ?
Comme je l’expliquais aux parents d’élèves lorsque j’ai initié la démarche en 2002 : manger bio c’est la contribution des citoyens des villes au bien-être des campagnes et en plus c’est bon pour la santé !
Alors pourquoi s’en priver ?
Le lien entre l’explosion des cancers et l’introduction des intrants chimiques (pesticides, engrais, etc) dans l’agriculture depuis l’après-guerre ne fait plus de doute aujourd’hui.
Savoir cela et ne rien faire c’est porter une lourde responsabilité en tant que responsable de politiques publiques. C’est la raison pour laquelle localement, à mon échelle, je mets tout en œuvre pour changer cette situation.
Proposer une nourriture saine et favoriser une agriculture responsable est un devoir civique
Où en êtes vous du bio dans les cantines du 2e arrondissement et avec quel impact sur le prix du repas ?
Nous proposons de repas composés à un peu plus de 50% en produits bio.
Sur les cinq composantes d’un repas (entrée, viande, légume, fromage, dessert et pain) nous servons, en moyenne, deux composantes et demi labellisées agriculture biologique.
Le pain, les crudités, les fruits, les féculents (riz, pâtes, céréales,…) et la viande de bœuf sont systématiquement bio.
Les yaourts de temps en temps.
La volaille est sous signe officiel de qualité et les fromages AOC.
S’ajoute à cela, une fois par mois, un repas entièrement bio.
Nous travaillons à introduire des légumes bio mais nous sommes limités par le coût supplémentaire que cela représente. Car nous avons fait en sorte que le gain qualitatif représenté par le bio ne traduise pas par une augmentation du prix des repas payés par les parents.
Le bio ne doit exclure personne.
Nous avons donc dû faire preuve de beaucoup d’imagination et négocier serré avec notre prestataire de repas.
Nous avons modifié la grille tarifaire en passant de 5 à 8 tarifs pour augmenter les recettes de la caisse des écoles.
Nous avons réduit le nombre de composantes (après consultation des parents d’élèves) et supprimé alternativement le fromage ou l’entrée pour les maternelles et primaires, tout en conservant évidemment les quantités nécessaires à un repas équilibré.
Quels sont les principales difficultés pour généraliser cette expérience à Paris ?
Les difficultés pour généraliser le bio dans tout Paris sont de deux ordres :
La première est une difficulté politique.
Je rappelle que lorsque nous avons introduit le bio dans les restaurants scolaires du 2e, en 2002, personne n’en voulait. J’ai même dû affronter la majorité socialiste qui y était, à l’époque, opposée. Pour la droite, les Verts avec leur bio, étaient des utopistes ou des farfelus. Personne n’en voyait l’intérêt. Beaucoup parlaient d’un effet de mode. Nous avons donc pu nous installer sur un marché où la demande était faible et permis l’organisation de filières d’approvisionnement. Et c’est là que réside la seconde difficulté mais qui au fond est aussi politique.
Il n’y a pas assez d’offre pour satisfaire la demande et les filières sont très peu organisées.
Or, en restauration collective les quantités sont telles qu’il faut pouvoir s’approvisionner sur des plates-formes de distribution structurées. Il n’y a, à ce jour, aucune volonté politique de la part de l’Etat de contribuer à l’organisation d’une production bio en quantité et qualité suffisante. Nous sommes incapables de sortir du modèle agricole hérité de l’après-guerre où plus l’exploitation agricole est intensive et extensive plus elle est aidée.
Alors que la profession agricole est sinistrée, les pouvoirs publics sont incapables de changer. 80% des aides de la politique agricole commune sont destinées à 20% des agriculteurs, déjà les plus riches et aussi les plus mécanisés et ceux qui utilisent le plus d’engrais et de pesticides.
Les seuls petits agriculteurs qui s’en sortent bien aujourd’hui et qui gagnent correctement leur vie sont ceux qui sont passés au bio.
Quelques informations complémentaires :
un repas végétarien est proposé tous les mardis
les menus sont définis par une commission où siègent des représentants d’élèves et des parents d’élèves
les poissons sont issus de la pêche responsable
ketchup et mayonnaise ne sont pas proposés ainsi que la mise à disposition des salières, et ceci bien avant l’apparition des derniers textes en vigueur.
la charcuterie est très rarement proposée
la présence d’huile de palme, d’huiles végétales hydrogénées ou d’OGM est entièrement proscrite
Les tarifs répartis en 8 tranches varient de 0,13 euros à 5 euros par repas.
En 2010, le prix d’un repas payé au prestataire se situe entre 2,94 euros (TTC) et 3,74 euros (TTC).
Le prix de revient d’un repas (matières premières, personnel, fluides, entretien) est 6,16 euros
A partir de cet exemple, où des étapes restent encore à franchir, il est clair qu’avec la volonté politique, les "cantines bio", sans surcoût payé par les parents, c’est possible.
A l’échelle nationale, la faiblesse de l’offre ( en France, seules 2,5 % des terres agricoles sont cultivées en bio) est un obstacle pour la mise en place générale du 100 % bio dans les cantines et pourtant l’avenir de nos enfants est en jeu !
Voir nos articles précédents :
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