La sortie du film documentaire « Nos enfants nous accuseront », réalisé par Jean-Paul Jaud, est sans aucun doute un évènement important de l’année 2008.
Ce film raconte l’histoire d’une petite ville du Gard, Barjac (1500 habitants), dont l’équipe municipale a fait un choix politique fort : elle a décidé dès 2006 de s’orienter vers une cantine 100% bio, en sensibilisant la population locale et en associant au maximum les acteurs du territoire : agriculteurs, cuisiniers, élus, parents, convives, commerçants…
Le réalisateur montre, à travers des extraits de colloques scientifiques, d’ interview d’agriculteurs et de citoyens, que les pesticides dans l’alimentation sont un danger avéré et qu’il est urgent de faire changer les choses.
Le 2 mai 2008 le premier Ministre François Fillon signait une circulaire allant dans ce sens :
Elle reprend les objectifs qui ont pu être fixés par le Grenelle de l’Environnement (mieux intégrer les préoccupations du développement durable dans l’agriculture et, en particulier, encourager le développement de l’agriculture biologique) en incitant les administrations à inclure 20 % de produits bio dans leur restauration d’ici 2012 (15 % en 2010)
Cette circulaire du 2 mai 2008 appelée « Etat exemplaire » vise également les contrats en cours d’exécution et demande l’obtention de signature d’avenants intégrant cet objectif.
Rappelons qu’à l’heure actuelle la part de produits biologiques en restauration collective ne dépassent pas les 0,5 % du marché de la restauration collective. En 2007, la restauration collective bio a été évaluée à environ 10 millions de repas bio ou comprenant au moins une composante bio mais c’est en restauration scolaire qu’elle était le plus développée.
Les collectivités se doivent d’être responsables et exemplaires dans leur achats : par les exigences qu’ils fixent dans leurs marchés, les acheteurs publics peuvent influencer de façon déterminante l’évolution des modes de production (développement d’une offre responsable) et de consommation (exemplarité envers le citoyen).
L’organisation de repas bio dans les écoles constitue un support éducatif de choix, pour aborder avec des enfants les liens entre alimentation, agriculture et environnement. De même que l’on peut éduquer par l’environnement (et non seulement à l’environnement), on peut aussi éduquer par l’agriculture biologique.
Par ailleurs, proposer des repas bio en collectivité revient à offrir la possibilité à chacun de tester ces produits et de bien manger, quel que soit son niveau de revenu, notamment en milieu scolaire où les prix des repas sont identiques pour tous. C’est aussi un acte de solidarité avec les agriculteurs locaux, puisque la fourniture de produits bio pour la restauration collective est encore aujourd’hui mieux organisée et accessible au niveau local que national dans bien des régions de France.
Enfin, manger bio en collectivité est loin d’être anecdotique pour notre santé comme pour l’environnement : la restauration collective représente près d’un repas sur dix en moyenne en France.
De plus en plus d’établissements scolaires décident d’introduire des produits bio dans le menu des cantines avec bien souvent pas ou peu de surcoût. Alors comment font-ils pour maîtriser leur coût ?
1- Choisir des produits de saison et de proximité
Transporter des produits biologiques sur des milliers de kilomètres est un non-sens écologique.
Le prix des produits agricoles varie au cours de l’année particulièrement pour les fruits et légumes, c’est pourquoi les acheter uniquement quand c’est la saison et donc quand ils sont les moins chers revient à faire des économies.
2- Revoir la composition des menus, dans le respect de l’équilibre nutritionnel
Opter pour les menus à quatre composantes au lieu de 5 (point 2.3 de la recommandation GPEM/DA du 6 mai 1999) permet d’équilibrer les menus autrement, et les économies réalisées permettent de proposer des produits biologiques.
Ce menu est alors composé de :
• un plat protidique + légume d’accompagnement, + fromage ou laitage + dessert et de pain,
OU
• entrée + plat protidique + légume d’accompagnement + fromage ou autre produit laitier et de pain.
La mairie du 2e arrondissement à Paris a opté en 2006 pour des menus à 4 composantes. Le pain et les légumes d’accompagnement, bio, y sont servis à volonté.
3- Réfléchir sur la place de la viande
Diminuer les grammages de viande distribués et y ajouter/substituer des protéines végétales( meilleur marché et meilleures au niveau nutritionnel) comme le boulgour, les lentilles, le couscous, la quinoa permet de respecter le quota réglementaire de protéines
Choisir des morceaux à cuisson lente, moins chers que les morceaux à griller.
La prise en compte d’une moindre fonte de la viande bio à la cuisson permet d’acheter moins de quantité de viande et peut permettre de passer de 50% de surcoût matière à l’achat à 15% ! En effet, la viande bio étant plus dense (plus riche en matière sèche, moins en eau, comme la plupart des produits bio), il y a donc moins de déperdition de poids à la cuisson. Ainsi, pour obtenir le même résultat dans l’assiette, il faut acheter moins de viande avant cuisson.
Expérimenter les repas alternatifs ou végétariens qui ne comportent ni viande ni poisson mais avec un bon accompagnement préalable : de jeunes enfants découvrant que leur escalope végétale n’a rien d’un steak haché peuvent être très déçus s’ils ne s’y attendaient pas !
Ces repas alternatifs permettent :
• de diminuer le coût des repas
• de proposer une solution aux convives qui ne mangent pas de viande
• de faire découvrir d’autres produits.
Exemple de prix de revient (variable en fonction du grammage de viande) pour un menu comprenant un taboulé en entrée, du bœuf à la provençale /galettes végétales avec une ratatouille en plat de résistance, camembert , faisselle bio au coulis de framboise en dessert, pain bio
Bœuf à la provençale (120g) et ratatouille (120g) = 3.37 €
Bœuf à la provençale (80g), galettes céréales (40g) et ratatouille (120g) = 3.31 €
Pas de viande, Galettes céréales (120g) et ratatouille (120g) = 2.62 €
Au lycée professionnel de Romainville, on sert chaque jour près de 200 repas d’ores et déjà constitués à 60 % de produits bio pour un prix du ticket qui n’excède pas 2.60€. En utilisant des produits bio et des recettes simples, le chef de cuisine a arrêté tous les exhausteurs de goût, sauces et autres ajouts très chers et inutiles sur des produits de haute qualité gustative. A la rentrée prochaine, tous les fromages passeront en bio en ne proposant plus qu’un laitage (yaourt ou fromage ) au choix.
A Paris, cinq arrondissements offrent déjà des repas bio dans leurs cantines, mais les grandes villes en général sont confrontées à des problèmes logistiques importants concernant les quantités de nourritures nécessaires sur toute l’année. C’est pourquoi il est indispensable d’inciter le développement à grande échelle des exploitations agricoles biologiques pour pouvoir répondre à la demande sans avoir à faire venir les produits de l’étranger parfois, leur transport constituant une totale contradiction avec les principes du développement durable.
Plus près de chez nous, la cantine associative de Bouvron sert 200 repas entièrement bio par jour pour un prix de ticket à 3,40 € dont 1,70 € de denrées (pour le même prix de denrées, la cuisine scolaire centrale de Nantes sert 12000 repas qui ne comportent que les yaourts et le chou rouge de bio !)
La municipalité de La Turballe envisage de passer de 11 % à 15% (conformément à la directrive) son approvisionnement en bio.
Les élus de Plessé étudient également l’approvisionnement de leur restaurant scolaire en produits bio et/ou locaux.
A Guérande : 90 000 repas sont servis dans les différentes écoles de la ville. Ce service est municipal et un engagement a été pris d’augmenter les approvisionnements en produits bio. Un point précis de la situation doit être fait sur cette question en Juin.
Le prix de revient d’un ticket de cantine est de 7,10 € (amortissement, frais de personnel, denrées...), sur cette somme 1,42 € représente le coût des denrées , montant important comparativement au prix pratiqué à Bouvron, 100 % bio. Le ticket est facturé 2,60 € aux parents.
La restauration scolaire de La Baule n’est pas gérée par la municipalité. C’est la société Avenance (groupe Elior) qui est en charge des cantines bauloises et s’est engagée en juin 2008 à servir chaque jour au moins un aliment bio ou issu du commerce équitable aux menus des enfants.
Depuis la rentrée de Pâques, et après intervention des parents d’élèves, le contrat est enfin respecté ! A surveiller....
Pour répondre à la demande locale en bio, faut-il encore avoir une production bio locale !
A un problème global, la réponse ne peut être que locale.
L’urbanisation ne doit pas se faire au détriment de l’agriculture, il faut un juste équilibre entre les composantes du territoire.
Il est indispensable d’une part de maintenir sur les communes de la presqu’île une activité agricole en préservant le foncier face aux appétits des promoteurs et d’autre part d’aider à l’installation de producteurs bio.
Pour cela, des organismes peuvent intervenir : la SAFER (Société d’Aménagement Foncier et Etablissement Rural) mais aussi le GAB (Groupement des Agriculteurs Bio), les syndicats agricoles, le GFA (Groupement Foncier Agricole). Les élus ne peuvent plus se permettent de dire : on ne peut rien faire...
Les communes qui ont pris l’initiative d’introduire des produits bio dans leur restauration scolaire témoignent de leur volonté de s’engager dans la voie du développement durable, en donnant une place croissante aux produits obtenus selon des modes de production et de transformation très respectueux de l’environnement.
La démarche est très souvent accompagnée d’actions pédagogiques pour sensibiliser les enfants et les adultes concernés aux questions d’environnement, de bien-être animal et de biodiversité, mais aussi à l’importance d’une alimentation équilibrée comprenant en particulier des produits frais, de saison et de proximité dans la mesure du possible.
Souvent, une réflexion globale est menée sur la manière d’assurer les approvisionnements, de préparer et de structurer les repas.
Les formules retenues sont très variables d’un restaurant scolaire à l’autre, d’un gérant à l’autre, d’un cuisinier à l’autre.
Certains choisissent d’organiser des repas 100% bio, d’autres d’introduire progressivement un ingrédient bio puis d’en augmenter le nombre et la fréquence.
La bio en restauration collective, c’est possible, les exemples qui se multiplient en France en témoignent.
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